Vive la farce

Le nord de la Lorraine a connu son lot de luttes ouvrières, mais là où ils étaient des dizaines de milliers à descendre dans la rue à la fin de la sidérurgie, ils n’étaient plus que quelques centaines lorsque l’usine Daewoo-Orion de Mont-Saint-Martin, a fermé ses portes. J’ai eu la chance d’assister à une AG dans l’usine, une nuit d’occupation. Les travailleurs en lutte, avec l’aide des syndicats, ont tenté de mobiliser la population ; ils ont distribué des milliers de tracts dans les boîtes aux lettres, rien à faire, la mobilisation tant attendue n’est jamais venue. Ils ont pourtant tenu bon, jusqu’à ce qu’une nuit, le 23 Janvier 2003, le feu saccage l’entrepôt où étaient stockés les tubes cathodiques qui représentaient un véritable « trésor de guerre » pour les ouvriers en lutte. L’enquête s’est faite à charge. Des ouvriers ont été ciblés. C’était forcément eux les coupables. Et tant pis si l’avocat de la défense a démontré que l’accusé principal ne pouvait pas avoir mis le feu cette nuit-là, la justice de classe est passée et l’accusé a été condamné à de la prison ferme. Le 17 février 2003, trois semaines après l’incendie, un commando masqué a fait irruption dans le local du député UMP de l’époque. Son fait d’arme ? Balancer un seau de purin dans le bureau. Pour un écrivain de polars, un seau de purin sur un député, c’est pour ainsi dire du pain béni, un acte romanesque par excellence. C’est ainsi que l’idée d’écrire ce roman a germé dans mon esprit. Tous les ingrédients étaient réunis : une usine qui ferme sur les décombres de la sidérurgie, un patron cupide, des produits chimiques dangereux qui risquent de finir dans une rivière, des syndicats incapables de mobiliser la population, la police au service d’une justice de classe, et un groupe de quatre anars prêts à en découdre avec humour. La F.A.R.C.E. ! était née.