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Mes Génies de Wandrille, La Cafetière
Sortie septembre 2020
Comment devient-on auteur de bande dessinée, est-ce un métier que l’on apprend ? Si par le passé nous avions tenté de répondre à cette question à travers une série d’Interviews (lire ici tous les dossiers) ; l’auteur, éditeur et désormais professeur Wandrille Leroy raconte son expérience dans ce livre. Deux ans de cours à l’Académie Brassart Delcourt comme formateur « en dessin d’expression et d’opinion » vont lui donner de la matière pour dévoiler les coulisses de cette école, de sa relation avec ses « génies ».
Une réflexion en temps réel —ou presque— entamé en ligne sur la plateforme Webtoon où l’auteur a testé ses planches, échangé avec ses élèves et les autres pédagogues. Un travail qu’il a affiné dans cet album, enrichi de chapitres supplémentaires et de plusieurs passages entièrement redessinés.
Dans ce livre, Wandrille en profite pour revenir sur le médium, sur ce qui est l’essence de la bande dessinée, se moquant au passage du fossé générationnel entre lui, et son admiration pour Corto, Lapinot ou Astérix, face à ces jeunes qui ne connaissent que Naruto. Son personnage joue le vieux con, s’amuse des nouvelles tendances où toutes les bandes dessinées doivent se positionner sur des sujets de société, tacle au passage Enki Bilal ou Joann Sfar, et bien sûr s’amuse de ses jeunes qui ne jurent que par le manga. Le lecteur attentif aura remarqué les références discrètes à Saint Seiya ou quelques cases de manga, soulignant le caractère fictif de ce prof tyrannique et désabusé.
Derrière le masque, l’auteur creuse le mythe du génie, car s’il y a bien une croyance forte dans le milieu de la bande dessinée c’est bien celle-ci et cet ouvrage passe au crible pas mal de clichés pour rappeler que plus qu’un don, c’est surtout du travail. Tous les dessinateurs le diront (lire quelques interviews ici, de François Schuiten à Claire Fauvel), c’est surtout une discipline, une remise en question et un travail permanent. Le professeur Wandrille essaie de faire passer le message à ses « génies » autant qu’au lecteur, donnant quelques clefs de compréhensions pour qui s’intéresserait ce qui se cache derrière leurs albums favoris.
Quelques références, définition, inspiration, exercices, mais aussi pas mal de notions détaillées comme les bulles, le hors-champ, les spécificités du dessin ou des décors, la couleur, les strips, l’humour, ou encore autofiction… Wandrille utilise presque toutes ces notions dans ce livre pour mettre en scène cette expérience et mettre en pratique ces conseils, donnant à voir une bonne idée de ce que l’on peut faire avec ces bases. Une base qu’il enrichit de nombreuses autres idées, de la mise en abyme de ses propres recherches au pastiche des ouvrages précieux du siècle des Lumières, pleins de titres de chapitres à rallonges, d’inserts ou de citations.
Conçues sous forme d’un journal de bord, les planches de Mes Génies se lisent comme un carnet de croquis, à la fois narratif et plein d’essais, de réflexions ou d’inserts dans ses marges. Des pages regroupées chapitres thématiques ponctuées de passage au présent où l’auteur fait part de ses réflexions, de son travail en cours à quelques amis ou au directeur de l’école, Éric Derian (lire son interview ici).
On conseille donc ce petit bouquin si vous voulez en savoir plus sur le processus créatif, sur les coulisses du métier ou simplement rire un peu du désarroi d’un prof perdu face à ses élèves. Retenez bien le titre de ce livre Mes Génies leurs pareils à deux fois ne se font pas connaître ◆ Ou comment enseigner l’Art de raconter dans une célèbre académie de bande dessinée à des virtuoses à peine âgés de 17 à 26 ans, ressenti 8 à 14 ans et surtout offrez-le aux futurs grands dessinateurs que vous connaissez !
Illustration principale © Wandrille / La Cafetière