Série conçue à l’origine pour la jeunesse, Tintin comporte plusieurs niveaux de lecture faisant le régal des adultes comme des plus jeunes. Après avoir fait ses premières armes en publiant Les Extraordinaires Aventures de Totor, C. P. des Hannetons ; Hergé lance son nouveau personnage dans le supplément jeunesse d’un journal catholique, Le Petit Vingtième.
Un héros boy-scout qui parcourt le monde pour ses reportages et fait figure de justicier occasionnel. Même si beaucoup d’œuvres ont pré-existé, c’est vraiment Tintin qui sera le point de départ de la bande dessinée en Europe, en faisant école et en impulsant un mouvement qui ne s’est pas arrêté depuis.
La série est traduite dans plus de 100 langues, dont de nombreux régionalismes, et son auteur est régulièrement l’objet de biographies, rétrospectives ou analyses.
Après les premiers albums influencés par la pensée de l’époque et ses mentors, Hergé va commencer à se documenter. Ce sera avec Le Lotus Bleu qu’il s’extirpe des clichés ou maladresses des débuts. Ses scénarios vont s’étoffer & ses personnages secondaires se dévoiler pour donner quelques-unes des plus belles réussites de la bande dessinée.
Autre jalon important, Tintin au Tibet qui marque une rupture dans son œuvre. Hergé vivant une période difficile matérialise sa quête personnelle dans cet album, marqué par les thèmes de l’amitié & de l’espoir porté par un univers blanc et des décors fantastiques. Après cet album plus spirituel, les aventures du reporter à la houppe s’éloignent un peu des origines de la série, laissant de côté l’aventure pour l’aventure, les gags faciles ou les scénarios alambiqués.
À l’aide de collaborateurs, comme Bob De Moor, E.P. Jacobs, Jacques Martin ou Roger Leloup, il affinera son trait, entre recherche esthétique et ergonomique. Synthétisant les éléments de son dessin, optimisant son langage graphique pour créer ce style si particulier que le dessinateur Joost Swarte baptisera « ligne claire ». Aussi inventif et moderne dans les histoires qu’il propose, que dans son trait, Hergé construit une œuvre forte aux pages inoubliables. Il essaie toutes sortes de techniques, adapte ses formats, re-découpe, re-dessine et ré-écrit bon nombre de ses histoires avec l’aide de ses assistants.
Hergé et son studio inventent la bande dessinée moderne, tout au long des 24 albums de la série, en fixant des standards encore dominants aujourd’hui. Ils vont passer presque 20 ans à redessiner inlassablement les planches jusqu’à obtenir ces albums canoniques que le plus grand nombre a lus. Exit certaines références colonialistes ou antisémites, les pages vintages et les versions découpées en strip. C’est l’un des secrets les mieux gardés de cette série iconique : elle est la seule au monde à avoir été redessinée plusieurs fois, presque dans son intégralité pour mieux coller à l’air du temps. Tintin est une œuvre en perpétuelle évolution qui n’a pas d’équivalent aujourd’hui.
Illustration principale : © Hergé / Casterman