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Incontournables
par Thomas Mourier - le 31/05/2019
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par Thomas Mourier - le 31/05/2019

Hollywood menteur de Luz

Si la vie de Marilyn Monroe passionne encore et continue d’inspirer les écrivains et les cinéastes, elle n’avait jamais encore été traitée du point de vue de la colère. Si l’égérie du cinéma américain de l’après-guerre a été photographiée, examinée, racontée sous toutes les coutures, Luz explore une nouvelle piste à partir de son dernier… Lire la Suite →

Si la vie de Marilyn Monroe passionne encore et continue d’inspirer les écrivains et les cinéastes, elle n’avait jamais encore été traitée du point de vue de la colère. Si l’égérie du cinéma américain de l’après-guerre a été photographiée, examinée, racontée sous toutes les coutures, Luz explore une nouvelle piste à partir de son dernier film The Misfits, où on découvre une Marilyn désabusée et en colère. En colère contre ses proches, qui prétendent l’être et cette industrie du rêve, Hollywood, qui l’a enfermé dans un personnage qu’elle n’aimait pas…

Depuis Catharsis en 2015, Luz explore une nouvelle voie en bande dessinée. Après ce livre qui raconte le traumatisme et la reconstruction suite aux attentats de Charlie Hebdo, il abandonne le dessin de presse pour mettre en image des récits plus longs, mais toujours aussi politiques et d’actualités. Il adapte le récit autobiographique d’Albert Cohen Ô vous, frères humains en travaillant ce rapport entre l’auteur et son œuvre, la découverte violente du racisme par l’enfant et son souvenir encore cruel et vivace par le vieillard. Puis, il entamera Misfits, une série en feuilleton dans les Cahiers du Cinéma, qui donnera ce livre Hollywood menteur. Puis, publie Puppy et surtout, Indélébiles (Indélébiles)sa déclaration d’amour à ses amis de Charlie et son apprentissage du dessin.

Des pages publiées dans les Cahiers du Cinéma, de septembre 2016 à juillet 2018, il en tire un album dense et noir sur le dernier tournage de Marilyn, un film écrit par son époux Arthur Miller et dirigé par John Huston. Un tournage très compliqué où l’actrice doit jouer un rôle écrit par un mari qui ne la regarde plus, au moment où elle tombe enceinte de l’acteur Yves Montand, aux côtés d’acteurs comme Clark Gable dont elle avait déclaré être amoureuse et qui meurt peu après le tournage. Son ami et confident Montgomery Clift, l’aidera à finir le film malgré ses propres problèmes et angoisses et le titre du film en devient prophétique avec ces acteurs brisés, anciennes gloires qui luttent contre eux-mêmes.

Si tout part de ce cri solitaire dans le désert, que l’on voit dans la bande-annonce, Luz tentera de le dessiner encore et encore pour saisir le visage en colère d’une femme photographiée des milliers de fois, mais jamais énervée. Elle crie bien dans le film, mais filmée de loin, à bonne distance dans ce désert mystique qui passe si bien à l’écran. Si l’histoire de ce tournage est très documentée, cette figure de Marilyn n’existe que dans cette bande dessinée. Au cœur de l’album, on assiste à la fois à la naissance du dessin et à la recherche du trait juste. Comme autant de rushs sur pellicule, le dessinateur essaie de capturer l’essence des personnages et leurs émotions. Un parallèle artistique, rare en BD car les albums présentent généralement la version la plus aboutie de chaque planche, avec le travail de l’acteur qui refait ses prises jusqu’à être juste. Un plaisir du dessin qui évolue avec son auteur au fil des albums. Une recherche de la sincérité derrière le trait qui cherche à bien tomber. Et l’histoire repart.
Un album étonnant dans sa forme, entre documentaire & fiction, essai & adaptation de secrets de tournages, livre engagé & plaisir de l’anecdote… Très fort dans le dessin entre cette recherche du dessin des émotions, d’une figure de Marilyn évanescente qui se transforme au fil des planches et des vieilles gloires du cinéma hollywoodien, Gable en tête, pastichées avec un trait plus rond, plus caricatural & plus proche du travail de Luz dans les journaux. Un album surprenant, non destiné aux seuls cinéphiles comme on aurait pu le croire, qui donne très envie de voir et revoir pas mal de films en commençant par The Misfits.

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Illustration principale & images extraites de l’album © Luz/Futuropolis

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