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par La rédac' Bubble - le 22/05/2020
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par La rédac' Bubble - le 22/05/2020

BD : les sorties de début 2020 qu’il ne fallait pas rater

Voici les titres que le confinement vous a peut-être fait rater, une séance de rattrapage des bonnes sorties de février et mars 2020 à demander à vos librairies, avant d’attaquer la reprise des nouveautés semaine prochaine.

Un rendez-vous mensuel réalisé à quatre mains par Rémi I. & Thomas Mourier. Retrouvez toutes les sorties BD, comics et manga sans la rubrique “Notre oeil sur les sorties”. Et venez en discuter avec nous sur les réseaux : FacebookTwitterInstagram.

📰 Sommaire

Nos conseils :

–  La Bombe de Didier Alcante, Laurent-Frédéric Bollée & Denis Rodier, Glénat
Les Sauroctones d’Erwann Surcouf, Dargaud
–  La Chute de Jared Muralt, Futuropolis
–  Karmen de Guillem March, Dupuis
–  Le voyage d’Abel d’Isabelle Sivan & Bruno Duhamel, Grand Angle
–  Stella de Cyril Bonin, Vent d’Ouest
–  Olive de Véronique Cazot & Lucy Mazel, Dupuis

💣 La Bombe de Didier Alcante, Laurent-Frédéric Bollée et Denis Rodier, Glénat

Il y a 75 ans, le 6 août 1945, les Américains utilisaient pour la toute première fois la bombe atomique à des fins militaires. Tout le monde se rappelle de cette triste date et des horreurs que le bombardement a engendré. Mais qui sait vraiment ce qui se trame derrière la course à l’armement atomique ?

Imposant par son format et sa pagination, ce livre l’est tout autant par son propos, son ampleur et son érudition. Les trois auteurs de ses 450 pages y déroulent leur récit choral prenant place à travers le monde bouleversé de la Seconde Guerre mondiale, et c’est toute l’histoire de la création de la bombe atomique qu’ils nous présentent.

Car contrairement aux nombreux récits qui abordent le bombardement et l’après, La Bombe traite surtout de l’avant. Tout y est exposé : le contexte dans lequel la bombe a été conçue, les personnages clés de son élaboration, les enjeux politiques, scientifiques, militaires et humains qui menèrent à ce tragique événement.

En résulte une BD historique richement documentée, accessible, claire, fluide, dense et passionnante. Un indispensable classique instantané qui laissera sa trace bien au-delà de la bande dessinée.

Rémi. I. 


🦂 Les Sauroctones d’Erwann Surcouf, Dargaud

Les Sauroctones d’Erwann Surcouf, Dargaud

L’une des bonnes surprises de ce début d’année, Erwann Surcouf se lance dans une grande saga d’heroïc fantasy entre hommage aux jeux de rôles et récits post-apocalyptiques. Un genre de reboot des X-Men version 2019 avec ses ados paumés en proie à des mutations violentes, une France post-catastrophe et une quête initiatique à moitié fantasmée. 

Dans un monde d’après où les vestiges de notre époque se distinguent à travers des publicités, un vieux smartphone et des cartes de jeux de société devenues monnaie d’échange. Un univers médiéval fantastique, où un trio d’ado se bat pour exister entre mythologie et mythomanie. On suit un gang de loosers qui s’autoproclame en chasseurs de monstres, mis en parallèle des exploits d’Axel Exel, le grand héros à qui ils vont voler la vedette. Tels Hercule ou Ulysse, ilest l’incarnation de l’héroïsme et un modèle pour plusieurs générations, le Sauroctone traque et détruit les créatures maléfiques qui ont envahi le monde. Sa légende va s’arrêter net pourtant à cause d’une bande de gamins immatures qui se rêvent en héros et cherchent une fusée pour quitter ce monde terrible. 

Vraie réflexion sur la création des histoires, sur comment une rumeur fait loi, chaque chapitre joue sur le contraste de ce que l’on voit et de ce que les personnages racontent. Cette aventure au long court est accompagnée de fausses couvertures de comics version pulp qui résument les différents chapitres et donnent le ton. Après les Unes d’Axel Exel, force est de constater que le trio fantastico lui pique la vedette et construit sa propre légende. Avec le Tamarro en toile de fond, un monstre redouté sur tout le continent, la quête de ces jeunes héros ne fait que commencer. Joueur, Erwan Surcouf nomme son monstre Tamarro, un équivalent du Dahu, dans les traditions du sud de la France. 

Une quête initiatique pleine de jeunes mutants, d’ultra-violence et de fun. Entre 2 combats ou agression, l’humour s’immisce. Du précieux talisman qui répète « Vous ne viendrez plus chez nous par hasard » au « stage d’observation de tueur de monstres » de zone au début de l’aventure, de la précieuse carte Olonel mouta, un grand héros du passé aux confréries secrètes comme celle des meuniers ninja… L’univers de cette série est très riche et l’auteur dose bien cette dualité entre récit prenant et délirant. 

Très rythmé, Erwann Surcouf a un sens du découpage aiguisé qui lui permet de garder l’attention du lecteur sur plus de 200 pages, avec pas mal d’ellipses et d’intrigues secondaires. Aplats de couleurs tranchées, alternance entre dessins rapides et pleines pages très travaillées : son dessin très lâché que dans ses projets précédents colle tout à fait avec l’ambiance doublée d’un travail sur les couleurs qui sert bien la narration. 

Le T2 est attendu pour l’an prochain après ce premier volume qui pose les bases et dévoile les personnages. On espère que les lecteurs sont au rendez-vous pour qu’il ait la liberté de développer plus avant cet univers bien trouvé. 

Thomas Mourier


💫 La Chute de Jared Muralt, Futuropolis

La Chute de Jared Muralt, Futuropolis

La lecture de La Chute est forcément impactée par les deux mois de confinement que nous venons de vivre. Paru quelques jours avant la proclamation gouvernementale, ce premier tome ne parle pas directement de notre situation, mais de l’effondrement. Le constat est simple : une crise sanitaire sans précédent a détraqué l’équilibre précaire de l’humanité. Rien ne va plus et la vie n’a strictement plus rien à voir avec ce qu’elle était jusqu’alors. Virus, pénuries, crises multiples se sont cumulés au point de faire basculer le monde d’avant dans le chaos.

En mettant en scène le quotidien bouleversé de Liam, père de deux enfants qui se retrouve seul face à cette nouvelle vie, La Chute expose un regard réaliste sur la situation. Car ce récit d’anticipation post-apocalyptique ne joue pas sur le sensationnalisme facile. Souhaitant aller plus loin que le divertissement, Jared Muralt pose avec ce premier tome les bases d’un récit prometteur. Son ambiance et ses dessins réalistes rendent le scénario tangible, encore plus maintenant que notre récente actualité a prouvé que cette dystopie était plus que plausible.

Rémi. I. 


💃 Karmen de Guillem March, Dupuis

Karmen de Guillem March, Dupuis

Et si la mort venait vous chercher en personne ? C’est ce qui arrive à Catalina, une jeune femme qui vient de mettre fin à ses jours en se coupant les veines. À présent dépouillée de ses attributs vestimentaires d’être vivant, mais invisible aux yeux de ses contemporains, elle est amenée dehors par l’énigmatique Karmen. Le voyage aurait pu vite se terminer là, mais l’ange de la mort a décidé d’outrepasser ses droits pour notre plus grand plaisir ! Car c’est en se créant un univers et des règles propres que ce récit mène vers des développements aussi inattendus que captivants.

Avec un découpage soigné, une mise en page audacieuse, des couleurs pop, un dynamisme entraînant et un dessin racé, ce one-shot nous propose un divertissement intriguant, moderne et drôle. Réfléchi, il garde des surprises jusqu’à la fin et en met plein la vue. L’encrage qui donne vie au dessin se pare de perspectives et cadrages audacieux et hypnotiques. Virtuose, l’auteur construit un scénario plein de vitalité dans lequel il a même l’élégance de présenter la nudité de son héroïne sans un once de vulgarité.

 Rémi. I. 


🧳 Le voyage d’Abel de Isabelle Sivan et Bruno Duhamel, Grand Angle

Le voyage d’Abel de Isabelle Sivan et Bruno Duhamel, Grand Angle

Avant Le retour, récit qui marquait le renouveau de la carrière de Bruno Duhamel, ses débuts en solo et son arrivée chez Grand Angle, Le voyage d’Abel était refusé par tous les éditeurs. Finalement paru en autoédition en 2014, le tirage de 1 000 exemplaires a vite été épuisé. Dorénavant figure incontournable de l’éditeur, il n’est pas étonnant de voir que l’auteur a enfin pu faire rééditer cette BD.

Celle-ci raconte l’histoire d’Abel, un agriculteur qui a repris la ferme familiale sans en avoir vraiment envie. Vivant dans un petit village en pleine campagne, lui, ce qu’il souhaitait profondément, c’était voir du pays. Mais bon, quand on a des animaux et des champs dont il faut s’occuper tous les jours, cette envie ne peut rester qu’un rêve.

Traité avec une grande délicatesse et pudeur, le récit de ce voyageur immobile est d’une douceur et d’une poésie qui touche en plein cœur. Baigné dans une bichromie douce, ce portrait de fin de vie plein d’humanité tient au scénario épuré d’Isabelle Sivan. Et au dessin, Bruno Duhamel signe avec ce Voyage d’Abel ce qui est certainement l’une de ses meilleures BD. Drôle, subtile, tendre et émouvante.

Rémi. I. 


👩‍🦰 Stella de Cyril Bonin, Vent d’Ouest

Stella de Cyril Bonin, Vent d’Ouest

Habitué au catalogue Futuropolis, Cyril Bonin débarque pour la première fois chez Vent d’Ouest. Avec son dessin que l’on reconnaît au premier coup d’œil, il entame un récit romanesque dans lequel un écrivain raconte son dialogue avec sa propre œuvre et son propre personnage principal. Mais surprise, un jour cette femme des années 50 prend réellement vie dans le monde actuel… ce qui va mener l’auteur et son héroïne vers l’inconnu.

En créant ce récit fantastique aux tonalités intimistes, Cyril Bonin tient le lecteur entre intrigue et suspense. Il capte l’intérêt avec sa mise en abyme simple, habile et surprenante, bien que parfois un peu facile.

Ce récit gigogne revisite le mythe de Pygmalion et en profite pour voir plus loin. En une petite centaine de planches aux beaux tons ocre et vert, il aborde de nombreux thèmes et mène à la réflexion. Combinant réalité et fiction, il approche le concept de noosphère, interroge l’identité, les rapports humains, l’évolution de la société, la science et la création artistique.

Rémi. I. 


🌖 Olive de Véronique Cazot et Lucy Mazel, Dupuis

Olive de Véronique Cazot et Lucy Mazel, Dupuis

Olive est une adolescente introvertie de 17 ans. Souvent absente aux yeux du monde réel, elle s’est créé son propre univers dans lequel elle est capable de naviguer et interagir. Façonnée par son esprit, elle le connaît, le contrôle et aime s’y perdre. Mais un jour, un cosmonaute s’y trouve propulsé et provoque un changement dans la vie de la jeune fille.

Après le remarqué Betty Boob, Véronique Cazot écrit ce qui semble bien parti pour devenir une série tout aussi marquante. D’un onirisme enveloppant, ce récit profond dresse le portrait d’une lycéenne en marge et instantanément attachante. On adhère immédiatement à ses personnages consistants et biens écrits, tout comme à l’univers imaginé pour son héroïne. Pour compléter ce scénario, les somptueuses aquarelles profondément colorées de Lucy Mazel nous font entrer à pieds joints dans le monde de l’énigmatique Olive.

Parfaitement réalisé, ce premier tome (sur quatre prévus) ouvre de bien belles possibilités de développement et se termine sur une révélation qui propulse Olive dans le monde réel. Mais stop, nous ne vous en dirons pas plus !

Rémi. I. 


Illustration principale : © Didier Alcante / Laurent-Frédéric Bollée / Denis Rodier / Glénat

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