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Incontournables
par Arno Kikoo - le 19/09/2020
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par Arno Kikoo - le 19/09/2020

Batman : Créature de la Nuit, ode magnifique au dépassement de soi

Plus tôt dans l’année, les afficionados de Kurt Busiek poussaient un soupir de soulagement. Après deux ans d’attentes depuis le démarrage de sa publication, le quatrième et dernier numéro VO de Batman : Créature de la Nuit sortait. Une mini-série qui nous parvient en ce mois de septembre chez Urban Comics, en DC Black Label, et qu’on ne pouvait manquer de vous chroniquer aujourd’hui à l’occasion du Batman Day. Une oeuvre aussi forte dans ce qu’elle raconte que par le vécu de leurs auteurs au moment de sa conception.

Batman - Créature de la nuit de Urban Comics

Déjà responsable de l’excellent Superman : Identité Secrète, Kurt Busiek voulait avec Créature de la Nuit reprendre son concept et l’appliquer au Chevalier Noir. On imagine donc un jeune garçon, Bruce Wainwright, qui sur une Terre où Batman n’est que, comme dans notre réalité, un héros de BDs, s’amuse des ressemblances qu’il a avec ce héros qu’il adore. Sauf qu’un jour, et comme son idole, ses parents sont assassinés sous ses yeux.

Rescapé de ce double meurtre crapuleux, le jeune Bruce traumatisé laisse exploser une rage sourde, face à cette injustice. Si seulement Batman existait vraiment, il aurait empêché ça ! Il le souhaite avec toute sa colère. Des mois passent, des évènements étranges arrivent dans la ville de Boston. Bruce a des visions d’une créature à l’allure de chauve-souris qui terrorise les criminels, retrouve les assassins de ses parents, et s’assure qu’il reste « sain et sauf » toute sa vie. Batman serait-il sorti de ses désirs pour se manifester dans le monde réel ? Ou tout cela n’est-il que le fruit de son imagination ?

Kurt Busiek ne vous donnera la réponse qu’à la toute fin, mais ce n’est pas tant la conclusion qui importe que tout le cheminement que doit faire Bruce au cours de sa vie. Dans Identité Secrète, Clark Kent se retrouvait à aborder les mêmes problématiques que Superman, un modèle qu’il n’admirait pourtant pas spécialement. Avec Créature de la Nuit, l’auteur va dans l’autre sens, et tâche de nous expliquer que même un Batman ne peut rien face aux nombreuses injustices de la vie. Ce faisant, Busiek n’a pas son pareil pour exposer avec force le traumatisme de Bruce, le pendant de la folie qui guette cette figure de la pop culture. Le récit est âpre, violent, difficile. La colère et le deuil qui n’en finit plus deviennent de plus en plus déchirants à mesure que Bruce grandit et croit agir pour le bien aux côtés de son alter-égo (?) nocturne. Parti d’un point de vue désespéré, Créature de la Nuit est en fait, par l’utilisation de Batman, une ode du passage à l’âge adulte. Une façon pour l’auteur de montrer qu’on peut affronter ses démons, et tendre vers un apaisement interne.

Batman - Créature de la nuit de Urban Comics
© John Paul Leon / DC Comics / Urban Comics

Cet aspect du récit est d’autant plus fort que l’on sait que Kurt Busiek souffre de graves problèmes de santé, et qu’au cours de la publication de la série, son artiste, le talentueux John Paul Leon, luttait contre un cancer. Quand bien même l’attente aura été longue, les deux compères se sont battus de toutes leurs forces pour proposer cette histoire qui parle aussi de combat intérieur ; et l’on ne peut que ressentir cette ténacité au cours des quatre chapitres qui composent le récit. L’artiste est là pour nous baigner dans une ambiance qui part du film noir pour lorgner vers une horreur sourde quand la Créature nous apparaît. Comme une forme d’hommage aux vieux films de monstres ou aux designs de Batman les moins humains, comme celui de Kelley Jones dans Batman Vampire. L’encrage est épais, mais le trait jamais confus, et la maîtrise des aplats force le respect. C’est pour cette raison qu’on ne saura trancher entre vous conseiller la version Noir et Blanc de l’album ou celle en couleurs.

Dans les deux cas, Batman : Créature de la Nuit est un immanquable. Une superbe exploration du mythe du Chevalier Noir rapporté à sa dimension humaine. Une histoire horrifique qui fait honneur à la psychologie torturée de Bruce Wayne sans lui donner ce nom, et un appel à dépasser les traumatismes que chacun peut rencontrer dans sa vie. Avec ou sans Batman à ses côtés, un album à mettre entre toutes les mains.


Illustration principale © John Paul Leon / DC Comics / Urban Comics

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