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Incontournables
par Thomas Mourier - le 17/08/2017
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par Thomas Mourier - le 17/08/2017

Snoopy & les Peanuts de Charles M. Schulz

Derrière le chien le plus célèbre de l’Amérique se cache une série qui détient l’un des records de longévité avec cinquante ans de publication quasi-ininterrompue.

Au départ simple chien de compagnie de Charlie Brown, Snoopy ponctue quelques gags en bousculant les personnages et ajoute une touche plus terre à terre au strip Peanuts. Une publication qui joue sur un comique soutenu et doux-amer autour de cette bande de gamins aux réflexions d’adultes.

Snoopy & les Peanuts T1 1950-1952 de Fanny Soubiran et Charles Monroe Schulz, Dargaud

Charles M. Schulz a mis en scène des héros d’un genre nouveau, des enfants qui ne se comportaient pas comme des enfants, encore plus selon les critères des années 50, qui réfléchissent et rejouent en miniature la société de l’époque. Un monde modèle réduit mais non stéréotypé qui permet de prendre du recule sur notre société en conservant un brin d’humour et de légèreté. Un dispositif fort qui lui permis d’être lu par petits et grands, connaisseurs et novices et à plusieurs degrés de lecture. Aucun adulte n’apparaît, ou en marge, et ces enfants malins, mélancoliques ou philosophes ont enchanté les lecteurs de journaux au point de parvenir en moins de dix ans au rang de phénomène international et de voir apparaître toute une gamme de produits dérivés. C’est aussi dans les années 60 que Snoopy “s’humanise”, se met à marcher puis parler, philosopher et incarner de nombreuses identités au gré de son imagination. Du haut de sa niche où il n’habite pas, il s’imagine pilote, écrivain, musicien, chirurgien, avocat… dans un tourbillon d’idées, au point que les strips alternent entre le groupe composé de “ce bon vieux” Charlie Brown, de Schroeder, Lucie, Linus, et Sally avec le groupe de Snoopy et Woodstock.

L’œuvre est une comédie de mœurs où nous suivons à la fois l’évolution des relations et assistons aux runnings gags qui se poursuivent au fil des ans. À chaque nouveau strip, on retrouve une histoire familière et une micro-variation qui renforce le plaisir. Dans toutes ses bandes, il mettra en scène une beauté de l’échec, chaque personnage échouant sans cesse au fil des semaines avec une touche d’ironie et de passion qui le pousse à continuer.
Tous ces enfants aux caractères bien trempés ont leurs tics, leurs névroses et leurs habitudes aussi la série lue dans son ordre chronologique ouvre un monde bien plus vaste que la lecture occasionnelle des strips ou quelques gags piochés ici ou là (même si chaque bande forme un tout cohérent et indépendant).

À l’image de l’esprit de l’œuvre qui véhicule des réflexions complexes de manière simple, son style de dessin véhicule beaucoup d’émotions en utilisant le moins de traits possibles. Un trait rond et ouvert, volontairement tremblé et qui ne se termine pas toujours. Une économie de moyen très travaillée qui lui permet de s’en tenir à l’essentiel de son propos.

Usant de la case comme les limites d’une scène, où les personnages entrent et sortent pour venir dire leur texte, l’ensemble ressemble à un théâtre de papier où le lecteur peut se projeter. Le dessin chez Schulz ne cherche pas le réalisme mais est au service des personnages et de leurs émotions, à travers les attitudes et les postures.

La légende dit qu’il dessinait un strip par jour seulement sur un carnet mais le gardait plusieurs mois de côté avant de le publier. Il y a là un secret de maturation qui explique, en partie, pourquoi ses strips se réduisent à un indispensable que plusieurs lectures ne parviendrons pas à épuiser.


Illustration principale : © Charles M. Schulz / Dargaud

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