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Incontournables
par Thomas Mourier - le 11/08/2017
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par Thomas Mourier - le 11/08/2017

Jimmy Corrigan, le gamin le plus intelligent du monde de Chris Ware

Méconnu du grand public, il est incontestablement l’un des grands génies de la bande dessinée contemporaine. En quelques livres, Chris Ware a bâti une œuvre forte et exigeante, où rien n’est laissé au hasard.

Il est incontestablement l’un des grands génies de la bande dessinée méconnus du grand public, Chris Ware a bâti une œuvre forte et exigeante où rien n’est laissé au hasard. Le dessinateur est connu pour son implication à tous les niveaux, de la création à la réalisation de l’objet, qui ont conduit à l’exceptionnel ovni Building Story en 2012.

Jimmy Corrigan de 
Chris Ware, Delcourt

Mais revenons au début des années 2000 et la publication en album de Jimmy Corrigan, le gamin le plus intelligent du monde (Jimmy Corrigan, the Smartest Kid on Earth) après dix ans de prépublications dans sa revue Acme Novelty Library publiée par Fantagraphics puis à compte d’auteur. Cas assez rare, la plupart de ses livres ont été prépubliés dans cette revue luxueuse dont il est le seul aux commandes, mais surtout, ils ont été publiés en parallèle. Alors que les épisodes de Jimmy Corrigan été prépubliés ceux de Building Stories avaient déjà commencés avec Quimby the Mouse, Rusty Brown, Jordan Lint.

Comme Art Spiegelman, Chris Ware est un artiste qui connaît parfaitement l’histoire du médium et s’en empare pour créer des œuvres puissantes et exclusives à la Bande Dessinée. Son travail imprime un seuil très élevé dans les possibilités du 9ème art et un aspect de son travail fonctionne sur l’exploration de ces limites. Son œuvre reste l’une des plus exigeantes pour le lecteur, dont l’attention extrême portée sur les détails, la mise en scène, le paratexte omniprésent, les perspectives axonométriques et à l’utilisation intense de l’ellipse (un des attributs majeurs de la BD)…

Il ira beaucoup plus loin dans Building Stories qui se présente sous forme d’une boîte contenant 14 petits livres illustrés aux formats différents sans mode d’emploi ou ordre de lecture particulier, chaque lecteur composant son “livre” idéal ou accidentel. Et qui sera différent à chaque relecture pour découvrir la vie de cette femme qui passe à côté de sa vie et présente pas mal de points communs avec Jimmy Corrigan. Un album dense de presque 400 pages, une plongée dans la vie de Jimmy, un adulte aux réactions d’ado. Puceau, introverti, dominé par sa mère possessive et hanté par l’absence de son père qu’il n’a jamais connu. Avant Thanksgiving, il reçoit une lettre de ce père inconnu et décide de le rencontrer en cachant cette nouvelle à son père. Et à travers cette histoire on découvre la vie de la famille de Jimmy sur 3 générations, s’entremêlant avec l’histoire de la ville de Chicago. En pointillé, on découvre la culpabilité et les problématiques qui semblent ataviques. L’histoire est bien plus complexe que ce résumé rapide, précisons que le dessinateur met en scène les émotions avec une simplicité et une sincérité rare et que malgré le résumé qui semble un peu mélancolique : tout le livre joue sur cet humour pince-sans-rire, ce comique du désespoir qui fonctionne à merveille dans les œuvres post-modernes contemporaines.

Difficile à décrire tant la relation texte-image est imbriquée, et les subtilités entre l’œuvre-objets sont grandes, vous devez en lire quelques pages pour vous faire une idée. Ne pas le faire serait passer à côté de l’un des auteurs contemporains les plus importants et d’une œuvre singulière, poignante et inoubliable.


Illustration principale © Chris Ware /Delcourt

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