Un tatoueur au passé trouble qui vit aussi discrètement que prudemment, un chauffeur de taxi d’Europe de l’Est un peu trop intrusif, une conspiration de grande ampleur, un final explosif : voilà les ingrédients qui composent Le Tatoueur, dernier polar noir de Matz et Futaki.
Un titre qui concentre toute l’essence du scénariste du Tueur, passé maître dans l’art du mystère, du polar et de la « BD noire ». Et si l’album est un peu moins remarquable que son grand frère car peut-être un peu plus « classique » dans son genre, il n’en reste pas moins de très bonne qualité.
Aux racines de la BD-thriller
Comme toujours avec Matz, trop en dire sur le scénario c’est prendre le risque de gâcher le plaisir de la découverte. Nous dirons donc simplement que le lecteur suit Zoli, un tatoueur qui par le hasard (ou le destin ?) se retrouve embourbé dans une série d’assassinats visant à mettre à terre une gigantesque conspiration. Lui-même traîne un lourd passé qui l’a obligé à quitter son pays d’origine la Hongrie : une dose d’ombre supplémentaire qui vient s’ajouter au tableau.
Au niveau du type de personnage que Matz met en scène, on reste en terrain bien connu : un type carré, badass, mystérieux, qui pourrait sortir tout droit de Sin City. De même pour l’intrigue, encore du Matz pur et dur : conspiration, crime organisé et violence. C’est peut-être même là l’ultime limite de l’album : pour qui est déjà familier du travail de l’auteur, on est pas trop surpris et le titre se démarque au final assez peu de ce que l’auteur a l’habitude de proposer
Graphiquement par contre, on est régalé. Le trait tout en clair obscur sans nuance de Futaki (qui là encore rappelle pas mal Frank Miller et son Sin City, en plus « réaliste ») convient parfaitement à l’ambiance pesante et mystérieuses du récit. Toute l’histoire ou presque se déroule de nuit, déposant sur Paris, théâtre de l’intrigue, un voile presque mystique du plus bel effet. Peu de fantaisie en revanche au niveau des personnages. Les visages sont burinés, les airs sont maussades, les épaules sont carrées : que des trombines (presque) caricaturales qu’on ne veut pas croiser la nuit dans une ruelle.
Le Tatoueur s’adresse donc sans doute avant tout aux néophytes du travail de Matz et à ceux qui s’initient au genre du polar et de la BD noire : ceux-là se régaleront. En revanche, les fans de longue date de l’auteur qui attendent du frisson et de la nouveauté ne sortiront pas vraiment de leur zone de confort. On reste néanmoins face à une BD de très bonne facture sur tous les plans (dessins, intrigue, rebondissements), qui ne peut donc que plaire.
Le Tatoueur, par Matz & Futaki, Grand Angle
Illustration principale : © Le Tatoueur / Matz / Futaki / Grand Angle